Royaume Uni : Les défis qui attendent le Première ministre Thérèse May

Négociations avec l’UE, reconstruction du Parti conservateur, gestion de l’Écosse… Les chantiers qui attendent la nouvelle locataire du 10 Downing Street, qui succèdera mercredi à David Cameron, s’annoncent colossaux.

Tout reste encore à écrire mais déjà avons-nous retenu ceci : Theresa May est la deuxième femme de l’histoire qui accédera à la tête du gouvernement britannique (après Margaret Thatcher). Mercredi 12 juillet, l’ancienne ministre de l’Intérieur se verra confier les clés du 10 Downing Street et les rênes d’un pays que la victoire du Brexit au référendum du 23 juin a fait basculer dans une période de grande incertitude et de fortes divisions politiques.

« Jamais depuis la Seconde Guerre mondiale un Premier ministre entrant n’avait encore hérité de dossiers aussi difficiles, affirme à France 24 le journaliste Peter Snodown, auteur de plusieurs ouvrages sur le parti conservateur britannique. Theresa May devra faire face à toute sorte de questions économiques, à commencer par la stratégie à adopter dans les négociations sur le Brexit, sans oublier la question de l’union entre l’Angleterre et l’Écosse qui est désormais en jeu. »

À l’extérieur comme à l’intérieur des frontières du royaume, les chantiers s’annoncent colossaux pour la nouvelle Première ministre. Revue des principaux défis qui attendent la nouvelle femme forte du gouvernement britannique.

• Renforcer sa légitimité

Ce peut être un handicap quand on dirige un pays en crise : Theresa May accède à Downing Street sans avoir tiré sa légitimité des urnes. « Elle ne devient Première ministre que parce que David Cameron a démissionné à la suite du vote au référendum « , rappelle Florence Faucher, directrice de recherche au centre d’études européennes de Sciences-Po-Paris.

En outre, l’ancienne ministre de l’Intérieur n’appartient pas au camp des vainqueurs du 23 juin. Celle qui s’apprête à gouverner le pays n’a pas fait campagne pour sa sortie de l’Union européenne (UE) mais pour son maintien. Davantage par loyauté envers David Cameron que par réelle conviction, dit-on cependant. Car, au long de sa carrière politique, Theresa May n’a jamais fait secret de sa méfiance envers Bruxelles. Sa légitimité, elle la tient peut-être de ce positionnement dans l’entre-deux : ni trop europhile pour trahir la volonté du peuple britannique ni trop eurosceptique pour braquer les partenaires européens avec qui elle va devoir négocier le retrait des traités européens.

• Négocier la sortie à Bruxelles

C’est le plus gros morceau de son mandat. Des pourparlers avec l’Union européenne dépend l’avenir économique, social et politique du Royaume-Uni. « Les principaux axes qui ont été mis en avant lors de la campagne portaient sur les questions d’immigration, mais il faut tout renégocier : les échanges économiques, la circulation des personnes, le sort réservé à la législation européenne qui avait été introduite dans le Royaume-Uni lors de son entrée dans l’UE en 1973… », égrène Florence Faucher. Les discussions s’annoncent longues et difficiles.

Mais Theresa May a d’ores et déjà exclu de faire marche arrière. « Le Brexit signifie le Brexit », a-t-elle insisté. Avant d’ajouter : « Et nous en ferons un succès. » Là encore, la tâche est loin d’être aisée tant les Vingt-Sept semblent peu disposés à l’idée de faire un cadeau de départ. La France a plusieurs fois émis le souhait que le divorce soit rapidement prononcé. De son côté, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Junker, a indiqué que le retrait du Royaume-Uni devait être négocié avant tout autre accord. En clair, la Première ministre est priée d’activer au plus vite l’article 50 du traité de Lisbonne qui enclenche le délai de deux ans pour la sortie définitive de l’UE.

« Elle ne devra pas perdre de temps car c’est comme cela qu’elle marquera rapidement de son empreinte le nouveau gouvernement conservateur », estime Nathanaël Uhl, rédacteur en chef du site Grey Britain. Aller vite, donc. Reste que, pour l’heure, Theresa May ne semble pas vouloir accélérer le tempo. « Elle avait dit qu’elle n’invoquerait pas l’article 50 avant la fin de l’année afin de pouvoir avoir, dit-on, des discussions informelles avec Bruxelles, rapporte Bénédicte Paviot, correspondante de France 24 à Londres. Elle souhaite bénéficier d’une période de stabilité et laisser le temps au Royaume-Uni de se préparer car, elle, elle n’en a pas eu beaucoup. Mais Bruxelles ne voit pas les choses de la même façon. »

Bien qu’elle ait annoncé un succès à venir, Theresa May fait déjà preuve de pondération sur certains sujets. « Alors que certains réclament que le statut des ressortissants de l’UE restent inchangés, elle a fait savoir qu’elle ne pouvait pas prendre de position sur cette question, indique Florence Faucher. Cela fait partie de ce qui doit être négocié et elle n’a donc offert aucune garantie ni dans un sens ni dans un autre. Elle reste très prudente. Ce qui est assez sage. »

• Ressouder le Parti conservateur

Dire que le Parti conservateur est sorti groggy du référendum est un euphémisme. C’est toute une formation qu’il faut aujourd’hui ressouder. « La campagne a été clivante : une partie du gouvernement et une partie, plus large encore, des adhérents étaient en faveur d’une sortie de l’UE », rappelle Florence Faucher. Si Theresa May succède à David Cameron à la tête du parti et du pays, c’est parce qu’elle est la seule à avoir su « calmer les impatiences et les incertitudes chez les Tories ». « Elle est parvenue à fédérer son parti, rallier autour d’elle non seulement des personnes qui avait fait campagne, comme elle, pour le maintien mais aussi ceux qui voulaient la sortie. Elle s’est montrée rassurante auprès des troupes conservatrices », analyse Bénédicte Paviot.

« IL SERA IMPORTANT DE VOIR QUI THERESA MAY VA NOMMER AUX POSTES-CLÉS »

Autant dire que la composition de son gouvernement, qui pourrait intervenir dès vendredi, sera scrutée à la loupe. Theresa May devrait sans nulle doute placer des pro-Brexit, mais à quel poste ? Les maroquins clés pourraient rester dans le camp du maintien dans l’UE puisque, selon la presse britannique, le ministre des Affaires étrangères, Philip Hammond, et celui des Finances, George Osborne, tous deux pro-« Remain », échangeraient leur fauteuil. Quant aux trois grandes figures conservatrices favorables au Brexit que sont Boris Johnson, Michael Gove et Andrea Leadsom, on ignore encore s’ils trouveront une place au sein du nouveau gouvernement.

• Éviter l’éclatement du royaume

L’autre fracture que Theresa May devra réparer, sinon réduire, est d’ordre territorial. Comment parler d’une même voix lorsqu’on sait que les europhiles d’Écosse, d’Irlande du Nord et de Londres, d’un côté, et le reste du pays anti-UE, de l’autre, ne souhaitent pas le même destin pour le Royaume-Uni. « La tâche est immense et la stupeur n’est pas près de retomber, notamment celle des Écossais bien décidés à en découdre, quitte à provoquer une crise institutionnelle, affirme dans le Huffington Post, Patrick Martin-Genier, enseignant à l’Institut d’études politiques de Paris.

Depuis le référendum, la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, réclame la tenue, dans les deux ans à venir, d’un nouveau référendum sur l’indépendance d’Edimburg. « L’attitude de l’Écosse dépendra de ce qui, lors des négociations avec l’UE, lui garantira d’obtenir ce pourquoi elle a voté. Mais pour cela, il faudra que Theresa May discute avec Nicola Sturgeon. » Cette dernière réclame d’ailleurs le droit de prendre part aux discussions avec Bruxelles. Reste à savoir si la nouvelle locataire de Downing Streeet est prête à venir accompagnée.
france24.com

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