Péril fécal au campus social de l’Ucad, conséquence de la fermeture des restaurants et toilettes

Après un jeu du chat et de la souris avec les étudiants sur la fermeture du Campus social de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), les autorités du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, ainsi que celles du Centre des œuvres universitaire de Dakar (Coud), ont mis les bouchées doubles.

En effet, en fermant d’abord le lundi 31 aout (délai de rigueur), les restaurants après le repas «d’adieu» de midi, elles ont fermé, ce mardi matin, toutes les toilettes du Campus social. Au grand dam des derniers occupants des lieux. Un tour dans ce dortoir à multiples facettes, a permis à Actusen.com de se rendre compte de l’ampleur de la mesure prise par les autorités du Coud.

Sur les lieux, le décor est impitoyable. Moins de 24 heures après la fermeture du Campus, des étudiants sans toilettes, se soulagent dans des sachets en plastique.

Les cacas, enveloppés, sont déposés dans les poubelles. Les bousiers et autres mouches s’y démènent. Et se régalent.

L’odeur fétide bouche les narines du passant. Les vieux habits, les chaussures de sport, les matelas, les chaises cassées…jonchent les carreaux. Un décor pitoyable. A travers ce reportage, Actusen.com a jugé utile de parler du péril humain qui se dessine à pas de géant. Afin que les autorités étatiques enjambent le temps et prennent toutes les mesures sanitaires qui s’imposent. Pour éviter tout soubresaut cauchemardesque avec Ebola qui rode à des centaines de kilomètres de Dakar, dans la sous-région.

Au dernier jour de la fermeture du Campus social de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (31 août dernier), le décor est pitoyable. Les lieux ressemblent à un nouveau monde. Tout est calme. Les passants peuvent être comptés du bout des doigts.

Le Centre Sinkou, jadis grouillant de monde, est désert. Les étudiants, qui squattent encore ces lieux, souffrent le martyre. Sans nourriture depuis lundi, à 14 heures, le pire leur est arrivé, ce matin du mardi 1er septembre, avec la fermeture des toilettes. Perdus, désorientés, déboussolés et troublés, alors que certains d’entre eux préparent des concours, ils ne savent plus à quel Saint se vouer.

Entre l’idée de partir ou de rester à tout pris malgré la ferme décision des autorités de ne pas transiger sur la question, les étudiants sont partagés. Ce mardi, vers 14 heures, dans les coins et recoins du Campus social, la chaleur estivale n’épargne personne. En dépit des gouttes d’eau tombées dans la matinée. Comme dans tout le reste du Campus, les étudiants défilent le long des artères.

Par groupes restreints, loin des vagues habituelles. Mais ils sont biens là. Casquettes bien vissées et tee-shirts moulants, en tenue relax ou d’été, ils marchent, allègrement, pour quitter le Campus ou regagner leurs chambres. Le temps d’exécuter la décision des autorités qui prend effet à 18 heures. Mais la plupart pour ne pas dire tous ont la mémoire balafrée. Et tentent tous de rassembler les lambeaux d’une existence que les autorités viennent de leur voler. En leur coupant le biberon, pardon le repas.

Interrogés, ils servent des avis partagés. En effet, si les uns sont pour de la mesure prise par les autorités, les autres sont contre. Mais font avec. Le temps passe. L’ultimatum fixé, approche. Certains étudiants encore sur place, plient bagages. D’autres résistent. Mais jusqu’à quand ?

Menu d’un étudiant : du «thiaff» à midi, du «thiakry» le soir…»

Rencontré devant l’esplanade du Pavillon A, Pape Codé Ndiaye, la vingtaine à peine dépassée, livre sa version des faits. Un sachet de «thiaff» et un morceau de pain entre les bras, un sac à main de couleur noir coincé aux aisselles, l’étudiant inscrit en Licence 3 de Physique-Chimie, croque des cacahuètes.

Des sandales enfoncés dans la boue après la pluie, témoignent, à suffisance, de la longue distance parcourue. «Je ne loge pas au Campus, mais j’y viens prendre mes trois repas quotidiens, avant de regagner ma demeure de Fass Delorme », renseigne-t-il.

Seulement, depuis lundi, ses habitudes alimentaires ont changé. Le natif du Saloum a adopté un nouveau comportement. «Je suis obligé de changer d’habitude alimentaire. Pendant l’année universitaire, je prenais les trois repas recommandés pour être en possession de toutes mes forces”.

Mais depuis deux jours, constate-t-il pour le déplorer, “tout a changé. Je prends du «thiaff» (graines d’arachides grillées) et un morceau de pain de 50 francs Cfa divisé en deux sous-morceaux. Le tout teinté d’un sachet d’eau à midi. Le soir, c’est du thiakry (du céréale au lait», avant de se coucher. Et le tour est joué. Provisoirement, évidemment !

A l’en croire, rien que pour les Travaux dirigés communément appelés TD qui continuent et les cours de rattrapage dans certaines Facultés comme en Sciences et techniques de la Terre (Fst), les restaurants devaient rester ouverts, car la situation ne dépend pas des étudiants. «En Licence 3 de Physique et Chimie, des cours de rattrapage s’y déroulent», nous apprend notre interlocuteur.

Pour Pape Codé Diop, c’est une course contre la montre pour les Professeurs qui veulent, à tout prix, terminer le programme et programmer des examens au mois d’octobre.

Des étudiants partagés, n’accordent pas leurs violons sur la mesure

Toutefois, contrairement à notre premier interlocuteur, un autre étudiant qui s’est confié à Actusen.com sous le signe de l’anonymat, est d’avis que la fermeture du Campus social, est la solution. «On ne peut pas rester au Campus 12 mois sur 12. Il faut savoir respecter les décisions, malgré les conséquences financières. Le Coud et son personnel ont besoin de repos, pour revenir en forme, à l’ouverture prochaine”, lâche notre interlocuteur.

Mieux, les locaux doivent être pulvérisés et réfectionnés, comme cela se fait chaque année», souffle-t-il. Arborant un tee-shirt de couleur blanche avec des écriteaux en bleu, où on peut lire : «j’aime mon pays et mon Université». Cependant, si cet étudiant manifeste son civisme et son patriotisme, ce n’est pas le cas pour certains pensionnaires du Campus social qui vivent mal la mesure drastique des autorités du Coud.

Au pavillon A, des habits accrochés sur des lignes de séchage, longent les couloirs. Comme dans un camp de réfugiés déguerpis, des matelas, des nattes, des chaises cassées, de vieux habits et serviettes, du bois d’un lit cassé et foulé aux pieds, y sont abandonnés pêle-mêle.

Le couloir H qu’a fréquenté le Président de la République, Macky Sall, est presque déserté. Comme l’avait déserté ce dernier, qui devait effectuer son pèlerinage dans son ancienne chambre universitaire, avant d’y renoncer sous le diktat d’étudiants sans civisme ni éducation et qui l’ont abreuvé de jets de pierres.

Dans ce couloir, les pensionnaires de son ex-chambre 168 sont partis. La porte est fermée à double tour. Les minutes s’égrènent. L’ultimatum de 18 heures approche. On ne veut être déguerpi de force. Le temps joue en défaveur des étudiants.

Avec ce visage, le Campus ressemble à un camp pour réfugiés

Pendant que nous nous entretenions avec notre interlocuteur devant l’esplanade du pavillon A, un étudiant arrive du portail avec un plat de riz en main. «C’est la mode, depuis hier. Ce plat coûte 700 francs Cfa. Pour un repas à midi et un autre le soir, il faut débourser, chaque jour, 1400 francs Cfa pour manger au Campus avec la fermeture des restaurants. C’est onéreux pour un étudiant sénégalais à Dakar», reconnait-il, sans trop de solutions.

Dans les couloirs sombres du Pavillon A qu’a parcouru Actusen.com, de long en large, un fait insolite a été découvert : des cacas dans des sachets en plastique. C’est l’horreur ! L’inimaginable ! L’inconcevable qui porte les empreintes d’une jeunesse sur tout un pays devrait compter pour assurer la relève de demain.

Qui l’eut crû ? En effet, les toilettes fermées depuis ce matin du mardi, c’est dans des sachets qu’une partie des étudiants encore sur les lieux, font caca. Puis plongés dans des poubelles. L’odeur nauséabonde des excréments, empeste les couloirs. Les mouches s’y agrippent. Et leur bourdonnement indescriptible, attire l’attention du passant.

L’horreur au Pavillon A !

A l’image de Actusen.com, tout autre visiteur douterait de la capacité de nos étudiants à faire montre d’une aussi grande légèreté et de saleté. Car même un élève au Cours d’initiation (CI), à l’école élémentaire, se garderait de recourir à ça. Source de tous les malheurs. Ici, les autorités doivent agir et agir vite, pour éviter l’irréparable. Surtout qu’à des centaines de kilomètres de Dakar, Ebola qui fait frissonner plus d’un pays, se promène comme pas possible.

Soumis à notre interrogation, Baba Ndiaye s’indigne. «Ce n’est pas normal, mais les autorités sont les seules responsables de cette situation», atteste-t-il. Et de renchérir : «pourquoi fermer les toilettes, alors que les étudiants sont encore là. Les élections des délégués de Faculté se poursuivent. Ceux de la Faculté de Lettres et Sciences humaines en ont jusqu’au vendredi. Comment ne pas attendre que tout cela se passe pour prendre cette mesure», s’interroge-t-il, en accusant, de manière ferme, les autorités.

Inscrit en Licence 2 au Département d’Histoire, Baba Ndiaye, trouvé assis dans le hall du Pavillon A, surfe sur son ordinateur portable. Entre deux portails d’informations en ligne, il attend l’heure de…partir. En effet, chaque année, dit-il, des chambres sont octroyées aux délégués de Faculté pour des logements de vacances, afin de mieux se préparer aux orientations des nouveaux bacheliers.

Mais précise-t-il, cette année, «jusqu’à présent, le Directeur du Coud ne s’est pas prononcé sur la question, alors qu’au plus tard, ce soir, tout le monde doit quitter les lieux».

Pour Baba Ndiaye, cette situation causée aux délégués de Fac est déplorable. «Nous cautionnons la fermeture, mais nous fustigeons le traitement fait aux délégués de Faculté».

L’heure est-elle arrivée de dire adieu au Campus social de l’Ucad pour…quelques semaines ? Difficile de répondre par l’affirmative. Car, avec les étudiants, rien n’est gagné d’avance.

Gaston MANSALY (Actusen.com)

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