Burkina Faso : le coup d’Etat consommé, après la démission du colonel Damiba

Le chef de la junte au pouvoir au Burkina Faso, le lieutenant-colonel Damiba, destitué

par le capitaine Ibrahim Traoré mais qui refusait d’abdiquer, a finalement accepté de démissionner dimanche, ont annoncé des chefs religieux et communautaires, « afin d’éviter des affrontements », ont-ils précisé, deux jours après le coup d’État.

Au Burkina Faso, le chef de la junte destitué, Paul-Henri Damiba, a présenté sa démission, dimanche 2 octobre. Celle-ci a été acceptée par les chefs religieux et communautaires ainsi que par le capitaine Ibrahim Traoré, nouveau dirigeant de facto du Burkina Faso, selon un communiqué.

« Suite aux actions de médiation » menées par ces chefs entre les deux rivaux, « le Président Paul-Henri Sandaogo Damiba a proposé lui-même sa démission afin d’éviter des affrontements aux conséquences humaines et matérielles graves », ont indiqué des chefs religieux et communautaires dans le communiqué.

Ils précisent que Paul-Henri Damiba, qui se trouvait dimanche à Lomé, selon des sources diplomatiques régionales, « a posé sept conditions » pour accepter de démissionner. Parmi elles figurent « la garantie de la sécurité et de la non-poursuite » des militaires engagés à ses côtés, « la garantie de sa sécurité et de ses droits, ainsi que ceux de ses collaborateurs » et « le respect des engagements pris » avec la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour un retour du pouvoir aux civils d’ici deux ans.

La Cédeao a salué les différentes parties burkinabè pour « avoir accepté un règlement pacifique de leurs différends » et annoncé l’envoi d’une délégation à Ouagadougou dès lundi.

Le capitaine Traoré assure la transition

Les chefs religieux et communautaires, très influents au Burkina Faso, affirment que le capitaine Traoré « a accepté » ces conditions, et ils « invitent la population au calme, à la retenue et à la prière ».

Le capitaine Traoré a annoncé, dans la soirée, avoir reçu le soutien des différents chefs de l’armée en vue de « redynamiser » la lutte anti-jihadiste.

Depuis l’annonce vendredi soir par des militaires emmenés par le capitaine Traoré de la destitution de Paul-Henri Damiba – lui-même arrivé au pouvoir par un coup d’État en janvier -, la tension a été vive au Burkina Faso.

Le putschiste déchu avait clairement fait savoir qu’il n’entendait pas abdiquer, en dépit des manifestations qui lui étaient hostiles.

Il avait appelé samedi les nouveaux putschistes « à revenir à la raison pour éviter une guerre fratricide dont le Burkina Faso n’a pas besoin dans (le) contexte » des violences jihadistes qui minent le pays depuis 2015.

Un communiqué séparé publié dimanche par les militaires pro-Traoré indique que le capitaine « est chargé de l’expédition des affaires courantes jusqu’à la prestation de serment du président du Faso désigné par les forces vives de la nation », à une date non précisée.

Dans un discours prononcé devant une trentaine de secrétaires généraux de ministères, le capitaine Traoré s’est excusé pour les militaires qui « ont troublé Ouagadougou » ces dernières heures.

« Cela est arrivé parce que certaines choses ne fonctionnent pas bien », a-t-il dit, et « il faut aller vite » pour changer cela, car « tout le pays est en situation d’urgence ».

Situation tendue à Ouagadougou

Des grenades de gaz lacrymogène ont été tirées dimanche de l’intérieur de l’ambassade de France à Ouagadougou pour disperser des manifestants soutenant le putschiste autoproclamé Ibrahim Traoré, qui a chassé du pouvoir le colonel Paul-Henri Damiba, lui-même arrivé au pouvoir en janvier par un coup de force.

Quelques dizaines de manifestants s’étaient rassemblés dimanche devant l’ambassade, mettant le feu à des barrières de protection et jetant des pierres à l’intérieur du bâtiment, sur le toit duquel étaient positionnés des soldats français, quand les gaz ont été tirés.

D’autres manifestants ont également été vus par le journaliste de l’AFP arracher des barbelés pour tenter d’escalader le mur d’enceinte du bâtiment diplomatique.

Dans ce contexte, le capitaine Ibrahim Traoré a appelé à cesser les actes « de violence et de vandalisme » contre la France, dans un communiqué lu à la télévision nationale.

« Les choses sont en train de rentrer progressivement dans l’ordre, nous vous invitons donc à vaquer librement à vos occupations et à vous départir de tout acte de violence et de vandalisme (…) notamment ceux qui pourraient être perpétrés contre l’ambassade de la France ou la base militaire française » de Ouagadougou, indique ce communiqué lu par le capitaine Farouk Azaria Sorgho, avec, à ses côtés, le capitaine Traoré.

Le Quai d’Orsay déplore « des dommages importants » à l’Institut Français de Ouagadougou

Samedi en fin d’après-midi, deux institutions françaises avaient déjà été prises pour cibles par des manifestants: un incendie s’était déclaré devant l’ambassade de France et l’Institut français à Ouagadougou, un autre devant l’Institut français à Bobo-Dioulasso.

« L’Institut Français de Ouagadougou a subi des dommages importants, c’est d’autant plus regrettable qu’il s’agissait d’un des principaux centres culturels de la ville, qui abritait la Bibliothèque Georges Méliès, qui était très fréquentée des Burkinabè », a déploré, dimanche, le ministère des Affaires étrangères.

« Des atteintes graves à la sécurité de nos emprises diplomatiques ont eu lieu hier soir à Ouagadougou, s’agissant de l’Ambassade mais également de l’Institut français, ainsi qu’à Bobo-Dioulasso où l’Institut a été vandalisé », a ajouté le Quai d’Orsay, condamnant « avec la plus grande fermeté les violences contre nos emprises diplomatiques au Burkina Faso ».

Ces attaques « sont le fait de manifestants hostiles, manipulés par une campagne de désinformation à notre encontre », a déclaré sa porte-parole, Anne-Claire Legendre, en « appelant les parties prenantes à assurer la sécurité » des bâtiments diplomatiques.

Sur France 24, Ibrahim Traoré fait marche arrière

Des informations faisant état sur les réseaux sociaux d’une protection accordée par la France au lieutenant-colonel Paul-Henri Damiba ont participé à attiser la colère des manifestants pro-Traoré.

Sur l’antenne de France 24, Anne-Claire Legendre a assuré samedi que « Paul-Henri Damiba n’avait jamais été accueilli » sur la base militaire française de Ouagadougou ou dans son ambassade. Dimanche, la porte-parole du quai d’Orsay a de nouveau rejeté toute implication de la France. « Il y a eu des rumeurs, selon lesquelles Paul-Henri Damiba était accueilli au sein d’une base qui accueille nos forces armées. C’est faux », a déclaré Anne-Claire Legendre.

Alors que les militaires putschistes ont également accusé la France de vouloir aider le lieutenant-colonel Damiba à préparer une contre-offensive pour se rétablir au pouvoir, Ibrahim Traoré, le nouvel homme fort du pays, avait semblé faire marche arrière samedi, ajoutant un peu plus à la confusion ambiante. « Une contre-offensive, oui. Soutenue par la France, je ne pense pas, » avait t-il affirmé en direct sur France 24.

« Je sais que la France ne peut pas s’ingérer directement dans nos affaires. Si on a d’autres partenaires aujourd’hui, qui peuvent nous soutenir, ne voyez pas forcément la Russie », avait-t-il poursuivi.

L’influence de Moscou ne cesse de croître dans plusieurs pays d’Afrique francophone ces dernières années, particulièrement au Mali et en Centrafrique.

Dimanche, plusieurs centaines de manifestants, réclamant la reddition définitive de Paul-Henri Damiba, scandant des slogans antifrançais et brandissant des drapeaux russes, avaient accompagné le cortège du capitaine Traoré à la télévision où il était allé pour l’enregistrement de son communiqué.

Frontières rouvertes et couvre-feu levé

Les militaires qui ont pris le pouvoir ont indiqué que le couvre-feu instauré vendredi de 21 h à 5 h (locales et GMT) avait été levé et les frontières terrestres rouvertes à compter de ce dimanche.

Paul-Henri Damiba était arrivé au pouvoir en janvier par un coup d’État qui avait renversé le président Roch Marc Christian Kaboré, discrédité par la hausse des violences jihadistes.

Mais ces derniers mois, des attaques frappant des dizaines de civils et de soldats se sont multipliées dans le nord et l’est du Burkina Faso, où des villes sont désormais soumises à un blocus des jihadistes.

Depuis 2015, les attaques régulières de mouvements armés affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique (EI) ont fait des milliers de morts et provoqué le déplacement de quelque deux millions de personnes.

france24.com avec AFP et Reuters
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