Sa facilité à poser sur n’importe quel beat lui a procuré le respect de tous les patriarches du hip hop sénégalais. Malheureusement en début de semaine, sa vie bascule dans le mauvais côté. Suite à un contrôle routier, un sac de faux billets d’une valeur de prés de 6 millions de FCFA a été découvert à bord du véhicule où se trouvait le jeune artiste rappeur, Ngaaka Blindé, en compagnie de ses amis.
Comme à l’accoutumée, le brouhaha médiatique qui s’en suit conduit à une certaine « bipolarisation » de l’information donnée sur cette affaire. En effet, deux versions des faits rapportées par les médias se confrontent.
La première version n’accorde pas de chance aux mis en cause de se tirer d’affaire. A l’en croire, les accusés ont délibérément commis cette faute avec l’aide d’un faussaire, un ami, étudiant à l’UCAD, dit-t-on dans des médias. La prochaine étape consistait à intégrer ces fausses coupures dans des circuits commerciaux, toujours selon le premier pool de médias.
La seconde version met sur scène le manager du vainqueur de la première édition Flow Up d’Africulturban. Il informe que ces faux billets étaient destinés au tournage du prochain clip de l’artiste.
En tout cas, à l’heure où les légalistes se plient à la présomption d’innocence des inculpés, les fans croisent leurs doigts pour que leur idole n’écope pas cette peine de l’article 119 du Code pénal.
«Quiconque aura contrefait, falsifié ou altéré des signes monétaires ayant cours légal sur le territoire national ou à l’étranger sera puni des travaux forcés à perpétuité et d’une amende décuplée de la valeur desdits signes et au moins égale à 20 millions de francs Cfa. Le coupable bénéficie de circonstances atténuantes, la peine ne pourra être inférieure à cinq ans de travaux forcés et à 1 million de francs d’amende».
Ce qui est devenu aujourd’hui « l’affaire Ngaaka Blindé » est un prétexte pour interpeller l’artiste sur la véritable posture qu’il doit incarner. En effet, chaque artiste doit chercher à donner le meilleur de lui-même dans sa communauté. Il doit être un « pédagogue », qui met en exergue l’exemplarité de sa personnalité, à travers ses actes, sa parole et ses opinions. Qu’il le veuille ou non, qu’il le sache ou non, l’artiste est la référence de son public, surtout lorsque celui-ci est jeune.
Tomber dans les dérives de sa vie de star est à bannir. Puisque la célébrité lui donne parfois des ailes l’incitant à se déifier et à voler dans les cieux de la mégalomanie, de l’arrogance, de la grossièreté.
La simplicité, l’humilité, la lucidité, l’humanisme, l’humanité, la maturité, la probité, l’empathie, un idéal certes, mais tout un parterre de valeurs sur lequel l’artiste doit reposer sa vie d’artiste. Pour cela, il lui faudra s’engager sans cesse dans un « jihad artistique » pour ne pas s’étioler dans les revers de la célébrité et éviter de s’attirer les « badbuzz » et le mépris de ses inconditionnels.
Des rappeurs comme Médine, Kery James, l’ont probablement réussi là où l’ancienne rappeuse Diam’s n’a pas voulu essayer.
Fort imbu des valeurs qu’il doit montrer, Kery James n’hésite pas à le faire savoir dans son dernier album, « Mohamed Alix ». Sur le titre, « Je ne suis pas un héros », il scande :
« Je suis resté au front. Je n’ai pas vendu ma révolution au plus offrant. Le succès m’a fait du pied, la fortune des clins d’œil. Mais pour cela, je devais giter mon intégrité dans un cercueil. J’ai refusé. Je l’ai fait pour moi, c’est vrai, mais je l’ai fait pour vous aussi (…)»
Quant à Diam’s, finalement convertie à l’islam, elle a préféré ranger son microphone.
« Ce métier fait sortir le pire de nous-mêmes », avait-elle confié dans une interview à la chaine française France 2, quelques temps après sa reconversion.
Est-ce une interpellation ou une mise en garde ? Ça ne l’est pas beaucoup plus que les confidences de la chanteuse suédoise Neneh Cherry.
« La notoriété ne nous permet pas de faire ce que l’on veut, mais ce que la société attend de nous », avait affirmé celle qui a chanté le titre « Seven seconds » avec Youssou Ndour.
Le public attend donc de ses artistes des comportements exemplaires, des attitudes d’un « Nandité » plutôt que des coups de tête d’un « Ngaaka ».
Amédine FAYE : actuprime.com
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Chronique : …Plus de « Nandité » que de « Ngaaka ».
