L’artiste-comédienne Yacine Sané veut ouvrir une maison de production pour le doublage de voix

On se souvient encore d’elle à la télé : «La collégienne», «Rama-Cathy», où elle a interprété avec brio le rôle de Combé

, «Baye Modou », parmi tant d’autres, dans des rôles où Yacine Sané nous a toujours scotchés sur le petit écran. L’artiste-comédienne, qui souhaite ouvrir à Dakar une maison de production qui s’occupera spécialement de doublage de voix, nous donne l’occasion de souligner, avec notre plume, quelques passages de sa carrière.

C’est une grande dame de teint noir et à la corpulence généreuse qui nous reçoit dans son bureau, vêtue d’un grand boubou en couleur marron avec quelques éclats de «vert» dessus. Entre les phrases d’humour, elle nous accueille avec le sourire. Notre comédienne n’est pas sur scène, mais ça ne l’empêche pourtant pas de jouer. A la voir s’exprimer, on sent une certaine aisance verbale, même si les lèvres desséchées de notre interlocutrice nous disent qu’elle a jeûné. De ses grands yeux noircis aux contours, en plus de ses sourcils bien formés, Yacine Aminata Sané nous balaie d’un regard. Mère de deux garçons, elle a aujourd’hui une quarantaine d’années, mais on lui en donnerait beaucoup moins. Nous sommes pourtant bien loin des années « La Collégienne », adaptation, sur le petit écran, du roman éponyme de Marouba Fall, sur fond d’amours impossibles entre un professeur et sa jeune élève. A la télévision, on se souvient surtout d’elle dans de seconds rôles : celui de la très astucieuse amie de l’héroïne, à laquelle elle sert plus ou moins de tête pensante.

Yacine Sané fait toujours un peu de théâtre, dit-elle, même si elle évolue davantage dans le cinéma actuellement. Ce n’est pas tout. «Comme je suis de nature entrepreneur, explique-t-elle, j’ai établi mon propre cabinet d’évènementiel et de communication, et en même temps je suis dans la production de films. J’ai l’habitude de faire beaucoup d’activités en parallèle, et même après l’université j’ai eu à effectuer des services en tant que pigiste dans des organes de presse comme l’Agence de presse sénégalaise (Aps) et le journal Le Témoin ». En ce moment, Yacine Sané a même quelques projets en tête : par exemple, celui « d’établir une maison de production à Dakar, qui s’occupera spécialement de doublage de voix, comme il n’y en a pas dans le pays. Comme j’ai eu la chance d’être formée à ces techniques-là lors de mon séjour en Chine, je me suis dit pourquoi ne pas en faire bénéficier à mon cher pays».

«MON PREMIER CASTING, C’ETAIT…»

Mais entre la dame et le théâtre, c’est une longue histoire, qui remonte à ses années lycée ou collège. Car à l’époque, Yacine Sané est dans toutes les sauces ou dans tous les clubs : «anglais, espagnol, Fosco (Foyer socio-éducatif Ndlr), etc.» Et à chaque fois que l’on entreprend un projet théâtral, c’est elle que l’on sollicite. Un jour, à la sortie de son école, le lycée John Fitzgerald Kennedy, Yacine Sané passe devant le Centre culturel Blaise Senghor, avec son «groupe de futées» de «Kennédiennes». La curiosité des jeunes filles les pousse vers le Centre, où elles tombent sur une compagnie en pleine répétition. Fascinées, elles n’hésitent pas à convaincre l’assemblée de leur donner des bouts de textes pour jouer.

Puis viendra le premier casting ; Yacine s’en souvient encore, avec émotion. Ce jour-là, raconte-t-elle, « on m’appelle pour m’annoncer que j’ai été coptée pour un casting que j’avais fait pour remplacer une fille dans l’une des plus grandes troupes de théâtre à l’époque : Les Gueules tapées. C’était un grand casting avec l’Ecole nationale des arts et j’ai été la seule à être choisie. C’est toujours bon de laisser des traces sur les chemins où l’on passe» laisse-t-elle entendre avec fierté. Mais la famille de la jeune fille ne voit pas d’un très bon œil son idée de faire du théâtre. Après le baccalauréat, Yacine se lance dans des études supérieures en Lettres germaniques à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad). En même temps que sa passion artistique, et contre l’avis de sa famille. « Un jour, se souvient-elle, ma sœur se porte volontaire pour assister à l’une des scènes que je jouais au Centre culturel français. Alors que je quitte la scène… » Yacine Sané marque une petite pause de quelques minutes, avant de poursuivre d’une voix tremblante. Les larmes coulent sur ses joues, mais elle s’efforce de parler : «Ma sœur est venue à ma rencontre, tout en larmes, et elle m’a enlacée en me disant qu’elle était fière de moi et qu’une fois à la maison, elle parlerait à toute la famille de l’exploit que j’avais réalisé, et à quel point j’avais assez de talent pour qu’on me laisse vivre de mon art ». A 19 ans, ce sera elle la première à ramener la somme d’un million de francs CFA à la maison. Yacine Sané ne s’arrête pas là : elle sillonne plusieurs pays, en passant par plusieurs festivals, où elle représente le Sénégal. « Je garde toujours des souvenirs de certains pays comme la Suisse, la Belgique, la France et d’autres pays d’Afrique de l’ouest. Mais la Chine est l’un de mes plus beaux souvenirs. Je me suis retrouvée parmi les 18 artistes que le gouvernement chinois a sélectionnés pour faire le doublage de voix d’un de leurs films. Les Chinois étaient impressionnés par notre diction et notre savoir-faire, et çà c’est vraiment significatif pour moi ».

QUELQUES POINTES DE REGRET…

Dans cette histoire, il y a tout de même quelques nuages, ou quelques regrets : « « Ce que je regrette jusqu’à présent, c’est mon apparition à la télévision. Chez les téléspectateurs, on a du mal à faire la différence entre le personnage du petit écran et la personne qui joue le rôle. C’est très difficile de leur faire comprendre que l’on n’est pas ce que l’on joue. Et quand on est une femme, c’est très compliqué» dit-elle avec le sourire.

Pour les comédiennes, les problèmes sont multiples, mais le plus tenace, c’est le manque de moyens. « Imaginez qu’une comédienne fasse deux productions sur deux années, et qu’elle soit obligée de dépenser plus qu’elle n’a perçu. Surtout avec nos histoires de femmes : quand on t’invite sur un plateau, tu es obligée de bien te vêtir parce qu’il faut toujours soigner son image. Sans parler de nos engagements sociaux et de nos projets qui nécessitent des ressources ».

Aujourd’hui, le théâtre est un milieu très prisé, qui attire de plus en plus de jeunes gens, filles et garçons. « C’est une bonne chose, dit notre interlocutrice, mais il faut qu’ils suivent la formation. Les centres sont là, des ateliers s’organisent sans cesse et des mentors dans le métier sont à la disposition des amoureux du théâtre. Il y a tout un cheminement à suivre si on veut vraiment être un professionnel. Pour les jeunes qui se disent acteurs et actrices, je leur conseille surtout d’être patients et passionnés. De toute façon, sans l’amour de l’art, c’est impossible d’évoluer dans ce milieu. Un artiste doit toujours être modeste, simple et humble ».

«LA STAR, C’EST LA TELE»

La comédienne n’hésite d’ailleurs pas à déplorer certains comportements ou la folie des grandeurs chez certains acteurs et actrices : « Qu’ils arrêtent de faire la grosse tête, parce que la star c’est la télé. La personne n’est star qu’au moment où son image est à l’écran. Après çà, elle n’est rien, il faut que les jeunes mettent çà dans leurs têtes. Je n’arrêterai pas d’insister sur la documentation, je veux que les jeunes apprennent à parler français, mieux, pourquoi pas l’anglais et même d’autre langues. S’ils veulent faire partie de ces acteurs de cinéma de renom, il faut qu’ils sachent parler les langues des autres horizons ».
sudonline.sn

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