Ziguinchor-Hausse des prix de l’anacarde: Les producteurs jubilent, les opérateurs trinquent

Depuis un mois maintenant, Ziguinchor et les autres localités de la région vibrent au rythme de la campagne de commercialisation des noix d’anacarde. Si les paysans et les producteurs se frottent bien les mains, c’est loin d’être le cas pour les opérateurs économiques et autres négociants qui tiennent difficilement à la flambée des prix de ce produit cette année. De 700 francs le prix du kilogramme, il est passé à 1000 francs dans les villa et 1100 francs à Ziguinchor. Une hausse des prix que les professionnels de la filière peinent à expliquer. La Guinée voisine qui s’est barricadée, avec son produit interdit de sortie de son territoire, a considérablement réduit le marché du cajou à Ziguinchor. Une région sud qui bat au rythme de la commercialisation du cajou .Une filière envahie par les Asiatiques (Indiens, Chinois, Vietnamiens)

Des noix étalées le long du boulevard des 54 m à coté de magasins, des femmes en pleine activité de remplissage de sacs. Ce spectacle reflète depuis quelques semaines la grande ferveur qui entoure la campagne de commercialisation de l’anacarde à Ziguinchor qui, avec plusieurs localités du sud vivent depuis au rythme de cette campagne 2017. Dans la forêt les opérations de collectes de noix vont crescendo. Dans les champs, certains ramassent les pommes, les pressent pour en tirer le vin de cajou. D’autres se chargent de la collecte des noix sous les yeux de négociants qui effectuent le pesage et échangent le kilogramme contre 1000 francs CFA. Après suit le processus d’embarquement des tonnes de noix et d’acheminement vers Ziguinchor.

Sur place, les Indiens très actifs contrôlent le marché. Le produit débarqué puis séché sous le soleil, des femmes entrent en action pour le mettre dans des sacs. Dans des conditions difficiles qui frisent l’exploitation humaines, ces femmes sous le chaud soleil sont rémunérées 100 francs le sac « Nous n’avons pas le choix, on est obligé d’accepter ce prix pour subvenir à nos besoins », lance avec dépit une dame, la quarantaine, visiblement éprouvée par la tâche accomplie.

Et ce n’est pas tout. Des hommes assurent physiquement l’acheminement de sacs de 100 kilos à l’intérieur des magasins. Une épreuve difficile pour « ces dockers du cajou ». La chaine de commercialisation se referme par l’exportation des noix vers d’autres cieux .La particularité de cette campagne cette année reste la hausse du prix du kilo qui s’échange à 1000 franc CFA .Une véritable aubaine pour les producteurs locaux qui vivent de cette filière.

Pour les professionnels et acteurs, cette nouvelle situation encourage le développement de la filière mais engendre quelques conséquences néfastes qui entravent les efforts de la transformation locale. A côté des paysans et autres producteurs qui rient, il y a les opérateurs qui tiennent difficilement à cette flambée des prix. Le Président de l’inter profession de l’anacarde ne cache pas ses inquiétudes. « Aujourd’hui les opérateurs économiques qui préfinancent la campagne ont du mal à débloquer de l’argent dans les banques. Imaginez que le kilo à 1000 francs pour une tonne il faut débourser 1.000.000 de francs CFA . Même la banque centrale n’avait pas prévu un tel scénario .Et à ce rythme la campagne risque de tirer en longueur », renchérit le Président de l’APAC qui liste d’autres inconvénients de cette nouvelle situation. « Avec cette hausse du prix 1000 franc CFA en brousse et 1100 francs en ville, les producteurs en augmentant les surfaces cultivables sacrifient les agrumes qu’ils éliminent tout simplement pour planter des anacardiers . Et si après quelques années les prix chutent, le réveil sera brutal et difficile pour ces mêmes producteurs », lance-t-il. Une des explications fournies par certains reste l’interdiction de sortie du produit par la Guinée Bissau voisine. Une bonne partie de la production venant de la Guinée, le blocage prive Ziguinchor de ces noix . Conséquence : les prix flambent conformément à la loi du marché.

« L’invasion asiatique » dans la filière anacarde

Jusque-là contrôlée par les Indiens appuyés par les exploitants locaux, la filière est envahie cette année par les Chinois qui s’illustrent dans la campagne. Ces asiatiques rivalisent avec les Indiens qui ne sont plus les seuls dans cette filière anacarde dans la région sud. Ce qui imprime une situation de concurrence dans cette campagne de commercialisation qui se déroule sur fond de fortes spéculations. Toutes choses qui boostent l’ardeur des producteurs qui se frottent bien les mains avec cette flambée des prix de la noix d’anacarde. L’anacarde, « l’or noir » de la Casamance, entre les mains des asiatiques (Indiens, Chinois, Vietnamiens) qui ont accaparé la quasi-totalité des magasins le long du boulevard des 54 m, cette route internationale. Passage obligée pour les véhicules Bissau guinéens .

Relever le pari de l’organisation de la filière anacarde

les acteurs de la filière anacarde se fixent le pari de lever les multiples contraintes qui plombent le développement de cette filière dont la chaine de valeur Anacarde au Sénégal est marquée par un faible niveau d’organisation .Une filière anacarde contrôlée par les négociants étrangers (essentiellement indiens et chinois ) qui assurent le financement de la campagne et fixent les prix. L’essentiel de la production étant porté par de petits exploitants avec des performances peu élevées (environ 250kg/ha ) .

Pour accompagner les acteurs , différentes structures qui s’activent dans la filière comme le COFAC ( Cadre de concertation des opérateurs de la filière anacarde en Casamance ), le PADEC ( Programme d’appui eu Développement économique de la Casamance ), le PDIF ( Programme de Développement intégré de Fatick ) , l’IRD ( International Relief and Développement ) et le FNDASP ( Fonds national de développement agro- sylvo- pastoral ), ont convenu de jeter les bases d’une collaboration . Une façon de conduire une initiative conjointe de co-construction, de formulation et planification participative de l’offre de services agricoles basée sur la demande des acteurs de la filière.

Professionnels de la filière, simples acteurs et autorités se penchent sur les stratégies à dérouler pour mieux transcender la panoplie de difficultés qui plongent la filière dans une extrême vulnérabilité soumise aux fluctuations des prix sur le marché extérieur, comme c’est le cas cette année avec cette flambée des prix et en défaveur des petits producteurs qui n’ont pas accès à l’information pertinente ni de prise sur les tendances du marché. la filière dont la transformation locale est très faible (moins de 5% ) reste très fortement arrimée au marché extérieur. L’anacarde, c’est 22.000 ménages qui tournent autour. C’est une filière stratégique importante en terme de revenus. Environ 60.000 tonnes, c’est la quantité de produits exportés l’année dernière. On estime à près de 250.000 les personnes qui vivent de cette filière. Aujourd’hui l’engagement de tous les acteurs reste une condition nécessaire pour accroitre la production et suivre les traces des pays comme la Cote d’Ivoire. Et il faut une transformation locale de la production locale d’anacarde pour maitriser les couts de production, augmenter les revenus et éviter de bazarder la production. C’est la conviction de certains professionnels de la filière qui prônent pour l’émergence de transformateurs au niveau des régions productrices de l’anacarde .Un produit que certains ont fini de qualifier d’or noir de la Casamance

L’anacarde, un chiffre d’affaires de plus de 60 milliards de francs CFA

L’anacarde pèse très lourd dans l’économie régionale. Avec le tourisme ce produit fait partie des poumons de l’économie régionale. L’année dernière la région sud a enregistré une production de près de 60.000 tonnes, ce qui équivaut à plusieurs dizaines de milliards de francs CFA. Le produit transite le plus souvent par la Gambie avant de se retrouver dans les industries asiatiques pour sa transformation. Aujourd’hui cette campagne de l’anacarde mobilise toutes les couches de la société. Et les élèves des écoles rurales de la région sud n’hésitent pas à sécher les cours pour le ramassage des noix en brousse. « Depuis un mois j’ai du mal à retrouver l’effectif normal de ma classe de cm2 … », nous confie un instituteur de l’école de MPack . Et comme si cela ne suffisait pas, un autre enseignant renchérit : « mes élèves se retrouvent presque tous dans la brousse, à la descente, pour la collecte des noix. Les prétextes ne manquent pas pour s’absenter. » Les populations se frottent bien les mains et il n’est pas rare de voir un villageois se retrouver avec plus de 30.000 francs par jour dans une « banale » collecte de noix. Les noix sont vendus cette année à un prix jamais égalé. Avec le jus qui est aussi vendu, l’anacarde reste un business florissant en ces temps qui courent à Ziguinchor.
sudonline.sn

Get in Touch

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Get in Touch

[td_block_social_counter facebook="tagdiv" style="style6 td-social-boxed" open_in_new_window="y" f_counters_font_family="394" f_network_font_family="891" f_counters_font_size="eyJhbGwiOiIxNCIsImxhbmRzY2FwZSI6IjEzIiwicG9ydHJhaXQiOiIxMiJ9" f_network_font_size="eyJhbGwiOiIxMyIsImxhbmRzY2FwZSI6IjExIiwicG9ydHJhaXQiOiI5In0=" counter_color="#ffffff" counter_color_h="#ffffff" network_color="#ffffff" network_color_h="#ffffff" tdc_css="eyJsYW5kc2NhcGUiOnsibWFyZ2luLWJvdHRvbSI6IjMwIiwiZGlzcGxheSI6IiJ9LCJsYW5kc2NhcGVfbWF4X3dpZHRoIjoxMTQwLCJsYW5kc2NhcGVfbWluX3dpZHRoIjoxMDE5LCJwb3J0cmFpdCI6eyJtYXJnaW4tYm90dG9tIjoiMjAiLCJkaXNwbGF5IjoiIn0sInBvcnRyYWl0X21heF93aWR0aCI6MTAxOCwicG9ydHJhaXRfbWluX3dpZHRoIjo3NjgsInBob25lIjp7Im1hcmdpbi1ib3R0b20iOiI0MCIsImRpc3BsYXkiOiIifSwicGhvbmVfbWF4X3dpZHRoIjo3NjcsImFsbCI6eyJtYXJnaW4tYm90dG9tIjoiNDAiLCJkaXNwbGF5IjoiIn19" twitter="tagdivofficial" youtube="tagdiv"]

Latest Posts

%d blogueurs aiment cette page :